- Actualité mise à jour le 19/04/2017
Le cyclone tropical Cook a traversé la Nouvelle-Calédonie le lundi 10 avril. Voici le bilan météorologique de son passage.
Figure 1 : Animation satellite au pas de temps 10 minutes du cyclone Cook (du dimanche 09 avril à 11h10 locales au mardi 11 avril à 10h40 locales) - Images provenant du satellite Himawari 8
Source : Météo-France Nouvelle-Calédonie
Formation et trajectoire du phénomène
La saison cyclonique 2016/2017 s’est révélée assez calme jusqu’au mois d’avril. C’était sans compter les formations tardives du cyclone Debbie, qui a touché le nord-est de l’Australie en début de mois, et de Cook qui a traversé la Nouvelle-Calédonie de part en part ce lundi 10 avril au cours de l’après-midi. Ce jour-là, l'ensemble du territoire a été touché par des vents violents et des précipitations intenses, localement exceptionnelles dans le sud du pays. Le passage de Cook a nécessité le déclenchement de l’alerte cyclonique N°2.
C’est en début de journée du 7 que le phénomène tropical prend naissance, au nord-est des îles Banks de l’archipel du Vanuatu. Au stade de dépression tropicale faible, Cook se déplace sud-ouest vers le Vanuatu. Le 8 avril, il traverse les îles Pentecost et Malakula en s’intensifiant. À partir du 9, il incurve son déplacement vers la Nouvelle-Calédonie, poursuit son intensification et passe au stade de dépression tropicale forte puis de cyclone tropical en fin de journée. Le 10 avril à 05 heures locale, Cook devient un cyclone tropical de classe 2 sur l’échelle de Saffir-Simpson. Son centre se situe à une centaine de kilomètres au nord d’Ouvéa avec une pression de 970 hPa, accompagné de rafales de vent de l’ordre de 200 km/h. Aux alentours de 16h, il impacte la côte Est de la Grande-Terre entre Houaïlou et Kouaoua avec de violentes rafales et de fortes pluies formant une mer déchaînée sous sa trajectoire. Il traverse la chaîne centrale en perdant logiquement en intensité mais les rafales restent très élevées. Il ressort en mer aux environs de Nessadiou aux alentours de 17h. Affaibli par la traversée, il décroît rapidement au stade de dépression tropicale forte dans la nuit de lundi à mardi. Il prend alors la direction du sud et s’éloigne du pays. Le mardi 11 à 11h, il se trouve déjà à 250 km au sud-ouest de la pointe sud de la Grande-Terre et malgré la présence de rafales de vent jusqu’à 80 km/h vers Nouméa, l’ensemble du territoire n’est plus sous l’emprise des vents cycloniques et des pluies intenses.
Figure 2 : Trajectoire du cyclone Cook du 8 au 11 avril 2017 (heure locale)
et vitesse moyenne maximale sur 10 minutes.
Source: Météo-France Nouvelle-Calédonie.
Analyse du vent
Lundi 10 au matin, Cook se renforce au stade de cyclone tropical de classe 2. A 11h, des rafales entre 150 et 200 km/h soufflent dans un rayon de 40 km autour de son centre. Le capteur de vent, situé à environ 75 km à l’est du centre, enregistre des rafales de secteur Nord-Est dépassant les 100 km/h à Ouvéa. Lorsque Cook impacte la cote Est et traverse la chaîne selon un axe Houaïlou-Nessadiou, seul le capteur de Nessadiou se trouve proche de la trajectoire et du centre. Il enregistre une rafale maximale de 183 km/h de secteur Sud l’après-midi. Mais les rafales sont estimées aux alentours de 200 km/h pendant l’après-midi et soirée du 10 autour du centre lors de la traversée. En terre, le rayon d’action des rafales maximales de secteur Sud à Sud-Ouest s’étend probablement jusqu’à 50 km au nord-ouest de l’axe de la trajectoire (121 km/h mesurés à Touho situé environ à 75 km au nord-ouest du centre). Dans le sud-est de la trajectoire, le rayon d’action des rafales maximales de secteur Nord-Est est plus grand et s’étend probablement jusqu’aux environs du lac de Yaté. 180 km/h et 163 km/h sont relevés respectivement sur la chaîne à Montagne des Sources et sur la côte ouest à Bouraké. Nouméa n’est pas en reste avec quasiment 130 km/h mesurés en début de soirée. La rafale maximale relevée à Ouanaham est de 91 km/h mais les rafales les plus fortes ont probablement dépassé les 100 km/h également à Lifou en journée. Le nord de la Grande-Terre au-dessus d’un axe Koné-Hienghène, Maré et l’île des pins ont été relativement épargnés de l’action de Cook avec des rafales nettement en dessous des 100 km/h.
Figure 3 : Rafales maximales enregistrées le lundi 10 avril 2017.
Source : Météo-France Nouvelle-Calédonie.
Analyse des précipitations
Les précipitations sont essentiellement tombées durant la journée du 10 avril 2017.
En deuxième partie de nuit du 9 au 10 avril, l’œil de Cook est localisé au nord-ouest d’Ouvéa, à environ une centaine de kilomètres de l’île. Ses bandes spiralées les plus actives, situées à l’est de son œil dans un rayon de 100 à 150 km, concernent directement les îles Loyauté, en particulier Ouvéa et Lifou. Maré, plus éloignée de l’œil, a été épargnée par les spirales les plus intenses. Ainsi, durant toute la journée du 10 jusque vers 19h locale, Ouvéa et Lifou ont été arrosées de manière discontinue. Sur 12 heures, les stations de Ouloup (à Ouvéa) et de Ouanaham (à Lifou) ont enregistré respectivement 69 mm et 104 mm, ce qui ne revêt pas un caractère exceptionnel.
En se déplaçant vers le sud, les pluies commencent à affecter la Grande-Terre le 10 vers 7h locales. Les bandes spiralées les plus actives du phénomène, engendrant par endroit plus de 200 mm de précipitations en 24h, recouvrent une région allant d’une ligne Yaté-Dumbéa à une ligne Kouaoua-La Foa (figure 4). Les communes situées dans cette zone sont abondamment arrosées, notamment durant l’après-midi du 10. En 6 heures, les pluviomètres situés à Boulouparis, La Foa, Kouaoua et Thio enregistrent des cumuls mesurés en moyenne une fois tous les 10 ans. Le cumul maximal sur 24 heures glissantes est détenu par la station de Thio Plateau (station SLN) avec plus de 400 mm.
Figure 4 : Cumuls de pluie enregistrés entre le 10 avril à 05h locale et le 11 avril 2017 à 05h locale.
Source : Météo-France Nouvelle-Calédonie.
Analyse de l’activité électrique
Le passage de Cook sur la Nouvelle-Calédonie s’est accompagné d’une faible activité électrique. Durant la journée du 10 avril, 413 arcs électriques dont 86 impacts au sol ont été enregistrés dans un domaine encadrant au plus près la Nouvelle-Calédonie. L’activité électrique a été engendrée au niveau des bandes spiralées composées de cumulonimbus. Elle s’est essentiellement produite près d’Ouvéa, entre Lifou et Maré, ainsi que sur la Grande-Terre au niveau des communes de Canala, Kouaoua, Houaïlou et Ponérihouen sur la côte Est et au niveau des communes de Farino, Sarraméa, Moindou et Bourail sur la côte Ouest (figure 5).
Figure 5 : Arcs électriques intra-nuages et nuages-sol enregistrés entre
le 9 avril à 00h locale et le 11 avril 2017 à 00h locale.
Source : Météo-France Nouvelle-Calédonie.
État de la mer et submersion marine
La surcote est la différence entre le niveau de la mer observé pendant le phénomène météorologique en cours et le niveau de la mer qui existerait en présence de la marée astronomique seule.
Figure 6 : schéma illustrant le phénomène de surcote.
Dans le cas d’un cyclone, la surcote, appelée également onde de tempête, est générée par les vents forts et la baisse de pression au niveau de la mer. Les ondes de tempête sont particulièrement dangereuses s'il y a conjonction avec la marée haute. On parle dans ce cas d’une marée de tempête. C’est ce phénomène de surélévation du niveau de la mer qui peut causer des submersions marines à la côte, et occasionner des inondations et destructions sur côtes basses et terres basses à proximité. La submersion marine due à la surcote peut aussi être accentuée par d’autres conséquences du cyclone comme la forte houle ou la crue d’une rivière.
Figure 7 : schéma illustrant le phénomène de submersion marine due à la conjonction d’une marée haute, d’une surcote et du déferlement de la houle. La surcote est l’élévation du niveau de la mer due à : (1) l’accumulation sur la côte de l’eau poussée par les vents extrêmes dans le sens de la flèche verte ; (2) la baisse de la pression atmosphérique (L) sur la surface de la mer.
Le runup est l’accumulation momentanée de l’eau sur le rivage causée par le déferlement d’une vague (houle). Le zéro hydrographique est le niveau de référence des cartes marines et des annuaires de marée.
Lorsque Cook passe au stade de cyclone tropical de classe 2 en matinée du lundi 10 entre Ouvéa et la Grande-Terre, les vagues générées par l’action du cyclone dépassent probablement les 6 m dans un rayon de 100 km autour du centre, avec probablement des creux maximums de 8 à 10 m près du centre.
Lorsque le cyclone et la marée de tempête impactent la côte Est dans l’après-midi, il n’y a pas de marégraphe assez proche de la trajectoire de la marée de tempête pour mesurer exactement la surcôte.
Le marégraphe de Ouinné, situé à 135 km du centre de Cook au moment de son passage, mesure une surcote de 55 cm en fin d’après-midi.
Figure 8 : Donnée du marégraphe de Ouinné du 10 Avril 2017. La marée prévue est représentée par la courbe jaune. Le niveau réel observé de la mer est représenté par la courbe bleue. La surcote, différence entre le niveau observé et le niveau prévu, est représentée par la courbe marron et se mesure sur l’axe des ordonnées à droite. Source : http://data.shom.fr
La pression au centre de Cook au moment de l’impact vers Houaïlou est d’environ 961 hPa. La surcote due à la baisse de pression à ce moment-là est de 50 cm au minimum. A cela, il faut ajouter l’action des vents forts d’afflux pendant le passage de Cook ainsi que l’action de la forte houle à l’extérieur du lagon qui contribue à augmenter le volume d’eau du lagon autour du centre de Cook. L’onde de tempête ou la surcote maximale a probablement atteint une hauteur de 1 à 1,50 m dans un rayon de 50 km autour du centre sur la côte Est.
Cette montée des eaux s’est opérée avant le passage de la marée haute prévue le 10 vers 18h sur la côte est. Il n’y a pas eu de conjonction de la marée haute et de la surcote au moment du passage de l’onde de tempête. Les submersions ont dû être limitées mais les informations manquent pour qualifier leur ampleur.
Sur la côte Ouest, la conjonction des fortes pluies s’écoulant dans les rivières, dont celles de La Tontouta et La Ouenghi, de la marée montante et de la surcote provoquée par le passage de Cook a provoqué des submersions aux embouchures et par conséquence des inondations importantes et rapides en terre.
La baie de Roche-percée était également une des zones les plus menacées par des submersions marines sur la côte ouest. Les précipitations importantes s’écoulant dans la Nera et la surcote ont contribué là aussi à une montée importante des eaux, probablement de plusieurs mètres. Les submersions ont atteint et endommagé la digue de la Néra, provoquant des inondations jusqu’à l’entrée de la ville de Bourail.
Figure 9 : Animation au pas de temps 5 minutes regroupant les cumuls pluviométriques et l'activité électrique durant le passage de Cook sur la Nouvelle-Calédonie (du lundi 10 avril à 05h05 locales au mardi 11 avril à 5h locales)
- les pluies faibles apparaissent en violet/bleu et les pluies fortes en jaune/orange
- les arcs nuage-sol sont identifiés par un carré et les arcs intra-nuage par un triange
Source : Météo-France Nouvelle-Calédonie