Après IAN qui a dévasté l'archipel des Tonga au début du mois de janvier, JUNE est le second phénomène de la saison cyclonique 2013-2014 du Pacifique Sud ayant atteint le stade de dépression tropicale modérée, et le premier à concerner la Nouvelle-Calédonie.
Formation et évolution du phénomène
Depuis plusieurs jours, une forte activité orageuse persiste dans la région des îles Salomon. A partir du mercredi 15 janvier 2014, plusieurs minimums dépressionnaires sont identifiables. Celui qui donnera naissance à la dépression tropicale JUNE se forme au sud de l’île de Guadalcanal. Il atteint le stade de dépression tropicale faible le 16 janvier à la mi-journée alors qu’il se trouve à environ 300 km au sud-ouest de Guadalcanal.
La dépression prend ensuite une trajectoire sud sud-est. Les conditions sont favorables et elle se renforce lentement pour atteindre le stade de dépression tropicale modérée le vendredi 17 janvier à 17 heures (heure de Nouméa). Elle est alors dénommée JUNE par le centre météorologique régional spécialisé de Nandi (Fidji), alors qu’elle se trouve à environ 280 km dans le nord nord-ouest des îles Belep. Sa pression est estimée à 995 hPa avec des vents moyens de 65 km/h et rafales à 95 km/h.
Dans la nuit de vendredi à samedi, son intensité reste stable tandis qu’elle se déplace à environ 20 km/h vers le sud sud-est, ce qui l’amène à 65 km dans le nord-ouest de Bélep au lever du jour.
Dans la matinée du samedi 18 janvier elle passe à 10 km dans l’ouest des Bélep, puis très près de l’île de Yandé en fin de matinée.
Dans l’après-midi, sa trajectoire l’amène à 20 km dans l’ouest de Koumac puis à 50 km de Koné vers 17 heures locales. Elle est alors à son maximum d’intensité avec une pression estimée à 989 hPa et des vents moyens de 75 km/h ainsi que des rafales à 100 km/h. Elle maintient son intensité et poursuit en direction du sud sud-est à 25 km/h durant la nuit de samedi à dimanche, ce qui l’écarte très vite de la Grande Terre. Elle se trouve ainsi à 230 km dans le sud-ouest de Nouméa le dimanche 19 janvier à 5 heures locales.
Dans la journée de dimanche elle s’évacue à plus de 30 km/h vers le sud, ce qui l’éloigne considérablement de Nouméa : à 17 heures locales, JUNE se trouve à environ 580 km de de la capitale.
Fig. 1 : carte de la trajectoire de JUNE (heure UTC*). Les points symbolisent le centre estimé de la dépression. Ils sont reportés toutes les 6 heures.
* heure UTC = heure locale - 11 pour la Nouvelle-Calédonie
Etat des alertes sur la Nouvelle-Calédonie
- La préalerte cyclonique a été déclenchée le vendredi 17 janvier à 15 heures locales.
- La province Nord ainsi que la commune de Thio sont passées en alerte cyclonique orange à partir du vendredi 17 janvier à 20 heures locales.
- Le samedi 18 janvier à 20 heures locales, tout le pays retourne au stade de la préalerte cyclonique.
- Le dimanche 19 janvier à 8 heures locales, la préalerte cyclonique est levée.
De très fortes précipitations sur l'extrême nord et la moitié est de la Grande Terre
Les pluies générées par la dépression tropicale JUNE ont certes concerné l'ensemble de la Nouvelle-Calédonie, mais ce sont surtout les communes de l'extrême nord et de la côte est de la Grande Terre qui ont été touchées par les averses les plus soutenues. Les communes de l’extrême nord de la Grande Terre sont celles qui se sont trouvées le plus près du centre de la dépression, où se concentrait une partie de son activité orageuse. Quant aux précipitations accrues qui ont concerné les communes de la côte Est, elles s'expliquent tout d'abord par l'accumulation et le soulèvement sur la chaîne montagneuse d'un air chaud et humide pris dans le flux de nord-est qui alimentait la dépression. De surcroît, les bandes de fortes précipitations qui tournaient en spirale autour de JUNE étaient surtout situées dans la moitié est de la dépression comme le montre l’image satellite ci-dessous.
Fig. 2 : composition colorée d'images issues du satellite MTSAT2 - vendredi 18 janvier 2014 à 8h.
Sur la pointe nord, la côte Est et les massifs montagneux attenants, les précipitations ont démarré dès le vendredi 17 janvier en fin de matinée sur la moitié nord pour se terminer dans la soirée du samedi 18 sur la moitié sud. Pendant ces 36 heures, on a relevé 2 pics d’intensité des pluies associés à deux bandes spirales : la première a touché le nord-est le 17 janvier en début d’après-midi, la deuxième l'a atteint dans la matinée du samedi 18 janvier avant de se décaler vers le sud. Pendant cette période, nos stations automatiques ont mesuré des cumuls sur 24 heures qui s'échelonnent de 150 mm à Poingam (commune de Poum) à 315 mm au Camp des Sapins (station SLN sur la commune de Thio).
A Pouébo, poste tenu par des bénévoles, nos observateurs ont relevé manuellement pour ces deux jours un total de 425 mm de pluie, soit 100 mm de plus que la quantité moyenne de précipitations pour tout un mois de janvier ! En une seule journée, il est même tombé plus de 315 mm, un nouveau record pluviométrique pour janvier, et le troisième plus fort cumul quotidien depuis l'ouverture de la station dans les années 1950.
Pour la plupart, les communes situées au sud de Koumac se sont trouvées à l’écart des zones d’intenses précipitations. En plaine, les plus fortes valeurs mesurées durant 24 heures sont comprises entre 51 mm à Tontouta et 157 mm à Koné. Sur les piémonts, nous avons relevé par endroits des cumuls plus importants comme à La Coulée (commune du Mont-Dore), où on enregistre jusqu'à 164 mm en 24 heures, ainsi que sur le plateau de Tango (Koné) où les précipitations en 24 heures ont atteint 251 mm.
Les îles Loyauté ont été touchées par des pluies équivalentes en intensité à celles de la moitié sud de la Grande Terre. A l'exception de Lifou, les précipitations en 24 heures n'ont pas dépassé 100 mm.
Fig. 3 : cumuls maximaux enregistrés en 24 heures pendant le passage de JUNE.
De bonnes rafales à l'avant et à l'arrière de la dépression
Les vents les plus forts ont été mesurés aux extrémités de la Grande Terre et dans l’axe des vallées avec des rafales supérieures à 100 km/h de secteur nord à nord-est : 116 km/h à Poingam le vendredi 17 à 23 heures, 126 km/h à Goro le samedi 18 à 23 heures. A Nouméa, les rafales ont atteint 92 km/h le samedi en fin d'après-midi. En montagne, les vents ont été sans surprise plus soutenus, comme l'attestent les 156 km/h mesurés à la Montagne des Sources le samedi 18 à 23 heures. Ces valeurs sont conformes à l’intensité estimée du phénomène.
Fig.4 : vitesses maximales de vent enregistrées le 18 janvier 2014.
A l’arrière de JUNE, on a observé de bonnes rafales de secteur nord-ouest à ouest sur le sud-ouest et l’île des Pins. Le dimanche 19 janvier, on a mesuré 72 km/h en rafales au Phare Amédée le matin et jusqu'à 66 km/h à Nouméa. Ces vitesses sont inférieures aux valeurs mesurées à l’avant de JUNE la veille, car entre-temps le phénomène s’est bien désorganisé.
Fig.5 : vitesses maximales de vent enregistrées le 19 janvier 2014.
Activité électrique
Le tout nouveau réseau calédonien de détection de la foudre, installé en novembre 2013, a observé l’activité électrique associée au passage de JUNE. Avec un peu plus de 4 000 éclairs détectés (entre les nuages et le sol ou à l’intérieur des nuages), JUNE a généré une activité électrique conséquente, même si ce nombre reste bien en dessous des 25 000 à 30 000 éclairs détectés lors de l’épisode orageux des 1er et 2 décembre 2013. L’activité électrique s’est principalement manifestée dans les bandes d’alimentation de JUNE, entre le Vanuatu et la Grande Terre. Ainsi, la foudre a touché Ouvéa puis Lifou. En comparaison, l’activité électrique est restée peu importante à proximité du centre de JUNE avec 400 arcs électriques détectés quasi-exclusivement au large de la côte Ouest.
Fig. 6 : localisation des arcs électriques détectés entre le 17 janvier à 8h et le 19 janvier à 8h.
Remarque : la capacité de détection du réseau est en cours d’évaluation. Certaines zones sont connues pour être moins bien couvertes, notamment le nord-est de Poum et la région du Vanuatu.